JOURNEES INTERNATIONALES CERIC-SCIENCES PO AIX
9-10 novembre 2017
La gouvernance internationale de la mer Méditerranée : Questions et évolutions contemporaines
Date limite de l’envoi des propositions de contribution : 15 Mars 2017
A envoyer à : Marie-Pierre Lanfranchi : mp.lanfranchi@wanadoo.fr
Mer semi-fermée bordée de 23 Etats, à la fois une et plurielle, la Méditerranée constitue un espace fragmenté et néanmoins partagé. Fragmentation politique et juridique mais communauté de destin : cette réalité en tension, caractéristique des mers régionales, est bien connue.
Par-delà les compétitions et rivalités, la problématique de ce qui est commun a conduit de longue date à la mise en place de mécanismes internationaux de gouvernance ; le « système de Barcelone » (la Convention et ses dix protocoles additionnels) depuis 1976 en constitue une des importantes manifestations. Dans le même temps, les riverains, mus par un accord tacite, se sont abstenus, jusqu’à une époque récente, de revendiquer l’exercice de droits souverains sur l’espace au-delà de la mer territoriale : soumise au régime de la haute mer, l’essentiel de la Méditerranée reste alors une mer libre. Cette époque est néanmoins révolue et nombre d’évolutions contemporaines questionnent aujourd’hui les pratiques et stratégies étatiques, le rôle des acteurs non étatiques (UE, ONU, acteurs privés, acteurs infra-étatiques) de même que les mécanismes de coopération jusque-là mis en place.
Enjeux croisés de nature culturelle, économique, environnementale, humaine, de sécurité : les facteurs qui concourent à ces évolutions et questionnements s’emmêlent et se conjuguent pour être souvent synonymes de risques nouveaux ou aggravés.
Les Journées se proposent de revenir sur ces grands enjeux contemporains autour de quatre thématiques principales :
I – MER ET CULTURE
Peu de zones ont été éprouvées à ce point par une violence se déclinant elle-même sur tous les modes. Matrice lumineuse des grandes philosophies et des religions du Livre, la Méditerranée a été dans le même temps une scène de tragédie et d’affrontements. Cela tient probablement au fait qu’en Méditerranée rien n’est jamais joué. Espace maritime, bordée de trois continents, elle est à la fois un facteur de séparation et de rapprochement. Point de rencontre entre des mondes que tout semble éloigner, elle peut devenir tour à tour une aire d’échanges et d’équilibre ou une zone de chocs. Aujourd’hui encore, elle offre le visage (torturé) d’un « microcosme du monde » : bordée d’une vingtaine de nations, représentant toutes les formes imaginables d’organisations politiques et sociales, reflétant une très large palette de modèles culturels.
L’enjeu est de comprendre si cet espace fait l’objet d’une perception convergente selon la rive à partir de laquelle on l’observe. La « méditerraneité » n’est-elle pas le fruit d’une construction européo-centrée ou existe-t-il une forme « d’universel méditerranéen » ? Quelles ont été les expériences visant à instaurer un dialogue interculturel en Méditerranée ? A l’instar de l’historicisme, l’approche consistant à faire de la culture le fondement exclusif du droit mène peu ou prou au relativisme. En effet, comme le souligne éloquemment R. Debray, « la culture n’est pas le lieu naturel de la confluence et de l’harmonie […] mais c’est la forge de l’identité » (Un mythe contemporain : le dialogue des civilisations, 2007, CNRS éd., p. 33). Rehaussé d’un zeste de rationalisme, le culturalisme peut toutefois favoriser l’enclenchement d’une logique d’adhésion consentie à des valeurs et à des normes. Qu’en est-il en Méditerranée ?
Parmi les thématiques possibles :
- « l’universel méditerranéen »
- expérience(s) et avenir du dialogue interculturel en Méditerranée
- culturalisme et identité
II – JURIDICTIONNALISATION DE L’ESPACE MARIN MEDITERRANEEN
Rivalités dans l’accès aux ressources biologiques, perspectives renforcées d’exploitation de ressources pétrolières et gazières, développement de l’exploitation des énergies renouvelables (éolien marin), pression sans précédent sur les gisements de granulats marins : tout concourt à renforcer la compétition entre les riverains, désormais lancés dans des stratégies d’accaparement des ressources, au-delà des eaux territoriales. Autrefois libre, la mer Méditerranée devient aujourd’hui une mosaïque de zones économiques exclusives, obéissant à des régimes différents, exacerbant les conflits d’usage et soulevant de délicates questions de délimitation, comme en témoignent, entre autres, le différend dans le Golfe de Piran, ou les tensions entre l’Espagne et la France dans le Golfe du Lion.
Parmi les thématiques possibles :
- état des lieux du zonage (proclamation de ZE)
- tensions liées
- questions de délimitation maritime (Golfe de Piran, Méditerranée Orientale etc…)
III – MER ET ACTIVITES HUMAINES
L’accroissement des activités humaines – y compris la navigation – et la pression accrue sur le milieu qui en découle, les risques nouveaux liés aux changements climatiques, alors que, dans le même temps, la mer Méditerranée est l’un des 34 « hot spots » de la biodiversité marine identifiés dans le monde, posent plus que jamais la question de l’évolution et de l’adaptation des mécanismes et
moyens de gouvernance internationale contemporains. Parmi les outils existants, le système de Barcelone est-il par exemple adapté à ces nouveaux défis ? De nouveaux modes de gouvernance sont-ils à inventer et la Méditerranée pourrait-elle alors faire figure de modèle pour les autres mers régionales ?
Parmi les thématiques possibles :
- perspectives en matière d’exploitation des ressources marines (biologiques, minérales)
- perspectives en matière de navigation
- enjeux environnementaux ; création d’aires marines protégées
- question des conflits d’usage
- instruments de coopération en Mer Méditerranée : l’existant, ses potentialités et ses limites
IV – MER ET SECURITE
Les révolutions arabes ont bouleversé la géopolitique régionale. La solidarité européenne en matière de police des mers a été mise à mal. La chute de régimes autoritaires au sud de la Méditerranée (Libye notamment) et le conflit syrien accroissent de façon sensible la crise migratoire en Méditerranée. Comment revoir la politique douanière européenne ? Faut-il remettre en cause ou continuer à s’inspirer du système qui avait été mis en place par Frontex (RABIT par exemple) ? Les nouvelles criminalités liées à l’hybridité des menaces (terrorisme, guerre asymétrique de Syrie, économie grise) entraînent un renforcement de l’action des Etats en mer (EuNavFor Med et plus généralement une militarisation croissante de la Méditerranée). Faut-il mieux l’encadrer ? L’ONU doit-elle se saisir de la question ? En réalité, la situation sécuritaire en Méditerranée s’accompagne de recompositions géopolitiques (retour de la Russie par exemple). Comment éviter que ces recompositions ne se traduisent par des tensions supplémentaires ? Les Européens peuvent-ils être des agents pacificateurs ? Sur quels leviers peuvent-ils s’appuyer (cadres bilatéraux ? 5+5 pour la Méditerranée occidentale ?…). Parmi les thématiques possibles :
- perspectives en matière de politique douanière
- avenir du système Frontex
- manifestations du renforcement de l’action de l’Etat en mer
- rôle et jeu des acteurs (ONU, UE, Etats)
Comité scientifique des Journées
Philippe Aldrin, Walter Bruyère-Ostells, Marie-Pierre Lanfranchi, Rostane Mehdi, Eve Truilhé-Marengo, Nathalie Rubio
Direction scientifique
Pour le CERIC : Marie-Pierre Lanfranchi, Eve Truilhé-Marengo
Pour Sciences Po Aix : Rostane Mehdi, Walter Bruyère-Ostells