Décès d’Emmanuel Gaillard (1952-2021)
Emmanuel Gaillard nous a quittés soudainement jeudi dernier, deux mois jour pour jour après
avoir annoncé, le 1 er février 2021, la création de son propre cabinet d’avocat.
Ancien étudiant de Paris II, il a rejoint le barreau en 1977 avant d’obtenir l’agrégation de droit
privé en 1982 et publier sa thèse sur Le pouvoir en droit privé. Il crée la pratique d’arbitrage
international en 1987 à Paris auprès du cabinet Shearman&Sterling et enseignera dans des
universités françaises de Lille, à l’UPEC en passant par Sciences-Po Paris mais aussi dans des
établissements prestigieux à l’étranger, de Genève à Harvard et Yale.
Toute en poursuivant cette double carrière il publiera des ouvrages clés dans le domaine de
l’arbitrage tels que, le Traité de l’arbitrage commercial international (avec comme co-auteurs Ph. Fouchard et B. Coldman), la Jurisprudence du CIRDI en deux volumes ainsi que Aspects
philosophiques du droit de l’arbitrage élaboré à partir du cours donné à l’Académie de droit
international de la Haye en 2007.
Emmanuel Gaillard a par ailleurs été un des co-fondateurs et le premier président de l’Académie de droit de l’arbitrage.
Avocat, arbitre, professeur, théoricien du droit, il est très difficile de résumer la vie
professionnelle d’Emmanuel Gaillard en quelques lignes mais si l’on devait singulariser un fait
d’armes cela serait sans doute l’arbitrage dit du « siècle » au profit des anciens actionnaires de
Yukos face à la Russie, une affaire toujours en cours. Les sentences rendues le 28 juillet 2014 par
un Tribunal Arbitral constitué sous les auspices de la CPA condamnaient la Russie à payer
50 milliards de dollars aux anciens actionnaires du groupe pétrolier, il s’agit de la plus grande
indemnisation jamais octroyée dans le cadre d’un arbitrage international.
A l’occasion de l’une des nombreuses interviews qu’il a donné la suite de cette sentence
historique Emmanuel Gaillard énonçait une phrase qui l’illustre à merveille : « le droit est une
science de l’action, j’ai toujours eu ce double intérêt théorique et pratique ».
C’est en homme d’action, en plein travail, qu’Emmanuel est décédé à Paris à l’âge de 69 ans.
Nos pensées accompagnent sa famille et ses proches.
Nicola Bonucci, avocat, ancien directeur des affaires juridiques de l’OCDE, second vice-
président de la Société française pour le droit international